La traversée Canaries – Cap Vert 27/11/2023-5/12/2023

La fenêtre météo n’est pas idéale, mais mes parents nous rejoignent au Cap vert début Décembre. Il est donc temps pour nous de quitter les Canaries. Ces iles nous ont beaucoup plu, alors que nous n’en attendions pas grand chose. Elles sont très différentes les unes des autres, nous aurions aimé aller également à La Gomera et El Hierro, ce sera pour une prochaine fois!

Comme avant chaque traversée, on guette la météo. On scrute le vent, sa force, sa direction, pendant plusieurs jours. Les différents modèles météo sont fiables sur plusieurs jours mais au-delà de 4-5 jours, on plonge dans l’incertitude. Le deuxième paramètre très important pour une navigation agréable est la houle. Une houle courte et/ou croisée et/ou de face, et c’est l’assurance d’une traversée pénible. A l’inverse, une houle longue et dans le sens du vent est idéale. Enfin, on se méfie des orages, très impressionnants en mer, et associés à des changements de vent brutaux en intensité et en direction. Pour les jours à venir, le vent est annoncé assez faible, la houle de 1 à 2 m, et le temps ensoleillé, ce qui annonce une traversée plutôt lente mais sans encombre.

On fait également les vérifications d’usage sur le bateau: montée au mât pour un point sur les haubans, les manilles, les drisses, les réas, check moteur, vérification des gilets, des lignes de vie, plein d’essence…

Enfin, point très important: l’avitaillement. C’est le domaine de prédilection de Damien, qu’il aimerait partager avec moi, mais que je préfère lui laisser exclusivement! Il n’y en a jamais assez. Il semble que certaines denrées soient difficiles à trouver au Cap Vert, il n’en fallait pas davantage pour justifier d’embarquer assez d’épicerie salée et sucrée pour 3 mois voire 6… Tous les coffres et les fonds de Sabali sont pleins à craquer. Le frais est plus délicat. Nous avons dans le bateau un frigo qui s’ouvre par le haut, ce qui ne facilite pas le rangement. Pas de congélateur à bord et les fruits et légumes murissent beaucoup plus vite en mer. On dispose des filets sur le portique arrière du bateau pour ranger ce que l’on n’arrive pas à rentrer dans le frigo.

Le 27 Novembre 2023, on finit par appareiller à 14h30. Toute la matinée nous avons attendu le camion de ravitaillement de gasoil. Il n’y a pas de station service à la marina de Tenerife, et c’est un camion qui vient ravitailler les bateaux sur demande. Sauf que ce jour-là, le camion en question a eu un accident et ne se présentera jamais. C’est en allant demander pour la nième fois à la marina qu’on obtient finalement cette information. La personne de l’accueil prend contact avec puerto Radazul, un port situé quelques miles plus au sud qui dispose d’une station, afin de nous permettre de faire le plein là-bas. On aurait aimer que cette solution émerge plus tôt, mais c’est mieux que rien.

On part au moteur, comme attendu, il n’y a pas de vent jusqu’à ce qu’on dépasse la pointe sud de Tenerife. Dans la soirée, on reçoit une alerte ASN sur la VHF: des bateaux se trouvent aux alentours des Îles Canaries, sans signalisation, sans feux de navigation la nuit, risquant la collision. Ce sont des embarcations de fortune qui transportent des migrants, de plus en plus nombreux sur cette route.

La première nuit n’est pas facile pour le rythme des quarts. Nous veillons à tour de rôle Damien et moi, toute la nuit. Nous faisons des quarts de 3 heures, qui commencent dès 20h. C’est Damien qui prend le premier quart, de 20h à 23h, pendant que je me repose, sans arriver à dormir cette première nuit. Le vent est très faible, on se traîne à 3-4 noeuds.

Le lendemain, le vent se lève doucement. On poursuit grand voile haute et génois. On fera un essai de Spi dans la matinée avec notre nouveau patin d’amure mais le vent est trop variable, on abandonne. On pêche un mahi mahi. Dans la journée nous sommes contraints de refaire du moteur jusqu’au soir où le vent refait son apparition. La suite est plus agréable, on avance à 6-7 noeuds, on peut refaire l’école le matin, les enfants réclamaient tellement!

Le 29 Novembre, nous sommes au large de la frontière mauritanienne avec le Maroc, à environ 150 miles. Nous croisons une grande barque en bois chargée de nombreuses personnes qui fait route rapidement vers le nord. Ils ne sont pas en détresse et nous ne les intéressons pas du tout. Quelques minutes plus tard, nous apercevons un grand zodiac à l’arrêt. Il ne semble y avoir personne à bord, mais ce type d’embarcation dans cette région, aussi loin des cotes, ne me rassure pas trop, voire m’inquiète vraiment. Pourtant il n’y aura aucun mouvement et nous poursuivrons notre route en prenant soin de rester loin de ce bateau moteur.

Le 30 Novembre, le vent forcit à 20 noeuds établis et des rafales à 25 noeuds. Dans la nuit nous essuyons un grain qui nous conduit à fermer le génois et ouvrir la trinquette, avec 2 ris dans la grand voile. Le vent reste assez soutenu ensuite, entre 25 et 30 noeuds.

Le 2 Décembre, nous voyons un ban de mahi mahi autour du bateau! C’est incroyable de les voir nager depuis le bateau, en surface. On en pêche un, et en remettant le leurre dans l’eau pour le rincer, un deuxième mord à peine touché l’eau! Le vent faiblit dans la journée, et le soir, on pêche le troisième poisson de la journée, un thon cette fois.

Le 3 décembre, on tangone le génois sur tribord avec la GV sur bâbord. Au menu, tataki de thon, mais et salade de choux, un régal offert par Damien et notre pêche miraculeuse. La journée suivante, on affale la grand voile pour ne garder que le génois. On pêche de nouveau une dorade coyphène. Cette zone est incroyablement poissonneuse. Le 4 au soir, c’est le leurre Rosette qui est en poste. On a une grosse touche qui plie la canne, Damien n’arrive pas à la sortir du porte-canne puis Paf! Le fil casse, et sous la tension revient quasi intégralement dans le cockpit de Sabali et recouvre Jules des pieds à la tête. Vers 20 h, il ne nous reste que 50 miles à parcourir. Toutefois on nous a vivement déconseillé une arrivée de nuit à Mindelo, à cause des épaves, des filets ou des boutes qui peuvent se trouver dans l’eau. On va donc ralentir en enroulant le génois jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un petit morceau de toile pour attendre l’aube.

L’arrivée sur le Cap Vert est assez incroyable. Nous n’en revenons pas d’être là avec notre Sabali, et d’avoir parcouru tout ce chemin. Les couleurs de l’aube sont splendides, le relief apparait petit à petit, l’ile de Sao Vicente à notre bâbord et Santo Antao à tribord. L’odeur de la terre nous parvient, comme après chaque traversée hauturière, pleine d’enchantement et de surprise.

A 8h00 heure locale, le 5 Décembre, nous sommes amarrés à la marina de Mindelo.

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